Chimie

Lyon est un des berceaux de l’industrie chimique en France, comme l’agglomération parisienne, la région marseillaise (où des soudières sont installées dès le début du XIXe siècle) ou les environs de Rouen. Profitant de la proximité d’un gisement de pyrite à Chessy, au sud du Beaujolais, l’industriel PErret établit dès les années 1820 une usine d’acide sulfurique dans la presqu’île entre Rhône et Saône. Les pouvoirs publics (Préfet et maire) demandent à des médecins de faire une expertise, inquiets de cette industrialisation proche de la ville. L’industrie chimique franchira le Rhône quelques décennies plus tard, s’installant à la Guillotière puis plus au sud, dans l’actuelle commune de Saint-Fons: c’est le début de ce qu’on appelle désormais la « vallée de la chimie ». Sur la rive droite du Rhône, peu après le confluent, une usine est également installée à Pierre-Bénite.

La chimie se développe dans diverses directions : colorants, produits de base, médicaments. De la teinturerie aux textiles artificiels, de nombreuses branches se développent à la fin du XIXe siècle et dans l’entre-deux-guerres, contribuant à l’industrialisation de l’est lyonnais (Villeurbanne, Vaulx-en-Velin).

En 1964, la mise en service de la raffinerie de Feyzin ouvre la voie au développement de la pétrochimie, et à la production de substances comme le chlorure de vinyle monomère. La catastrophe de Feyzin, le 4 janvier 1966, jette un voile d’inquiétude sur le « progrès » industriel.

Au tournant de la décennies 1970, la chimie est présente dans les discours sur les pollutions et la nécessité de protéger « l’environnement ». Ainsi, en octobre 1969, un journaliste du Progrès qui rend compte d’une « Semaine pour l’air pur » écrit : Nous avons choisi de vivre sous le joug d’une civilisation de la chimie, nous y sommes. Elle a la main dure. (AM Lyon, 462WP13, « La lutte contre la pollution n’est pas seulement une question d’information et de contravention », Le Progrès du 23 octobre 1969). A compter de l’été 1970 et jusqu’au printemps 1971, de très nombreux habitants de l’agglomération lyonnaise téléphonent ou écrivent aux pouvoirs publics, ou aux médias locaux, pour se plaindre d’odeurs incommodantes: l’industrie chimique figure parmi les principaux accusés, comme l’usine Roussel-Uclaf de Neuville-sur-Saône, pourtant à plus d’une dizaine de kilomètres au nord de Lyon.

Le problème des déchets chimiques se pose également, à l’occasion d’affaires de pollution des eaux ou de sites pollués par des fûts déversés illégalement. https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/caf94064823/deversement-de-camions-a-bonneuil

C’est le cas pour l’agglomération lyonnaise, avec la décharge du Bouquis, à Dardilly, et l’ouverture d’une usine spécialisée dans le traitement des déchets industriels à Saint-Vulbas dans l’Ain.

Les restructurations industrielles de la fin du XXe siècle voient la fin de grands groupes régionaux, comme Rhône-Poulenc, devenu Solvay – groupe d’origine belge – et la transformation de certains sites industriels anciens en plateformes avec différentes entreprises et sous-traitants.

Depuis les années 2010, le Grand Lyon soutient la transition vers une « chimie verte », et un pôle de compétitivité, Axelera, aide le développement et l’innovation.

 

Bibliographie indicative

-Une analyse de la géographie de l’industrie chimique au seuil des « Trente Glorieuses »: Michel Laferrère, « Les industries chimiques de la région lyonnaise », Revue de géographie de Lyon, Vol. 27 n°3, 1952, pp. 219-256.

– Une description ethnographique de la vallée de la chimie aujourd’hui :

François Duchêne, Léa Marchand, avec les photographies de David Desaleux, Lyon, vallée de la chimie. Traversée d’un paysage industriel, Lyon, Libel, 2015, 175 p.

– Sur les tentatives syndicales de lutter contre les risques professionnels induits par l’activité chimique :

Renaud Bécot, « Les valeurs de la santé. Des syndicalistes dans le gouvernement des risques industriels, 1966-1987 », Sociétés contemporaines, 2021/1, n°121, p. 29-56.

– Une thèse de science politique dirigée par Gwenola Le Naour, membre de Transenvir :

Cécile Ferrieux, Les couloirs du risque: les milieux industriels et le gouvernement local des risques dans la vallée de la chimie, thèse de science politique, IEP Lyon, 2015.