Médias

Le tournant environnemental des années 1970 doit beaucoup à la médiatisation des problèmes d’environnement, même si es médias se sont intéressés à l’environnement bien avant que le mot ne surgisse dans l’espace public. Ainsi, en Grande-Bretagne, même la presse satirique pouvait, dès le milieu du XIXe siècle, s’indigner de la pollution de l’air des villes industrielles, ou de l’eau de la Tamise. Et le brouillard londonien était la référence à l’aune duquel était jugé le brouillard lyonnais…Plus tard, à la fin des années 1950 et au début des années 1960, la pollution de l’air à Paris suscita de nombreux articles dans la presse écrite, et des reportages ou des émissions dans les médias audiovisuels. Les scientifiques et acteurs de la mesure de la pollution, comme l’Association pour la prévention de la pollution atmosphérique (APPA), furent à l’affût d’une couverture médiatique, notamment lors de la « Semaine pour l’air pur » qui se tint en octobre 1969.

Tandis qu’une catastrophe comme celle de Feyzin, le 4 janvier 1966, faisait l’objet d’une couverture insistant sur les dégâts et le drame humain qu’elle engendrait, quelques années plus tard le traitement s’est complexifié en intégrant la nouvelle notion d’environnement, et en jouant parfois sur les échelles géographiques pour mettre en lien les risques locaux avec les cas relatés dans d’autres pays, ou avec des problèmes globaux.

Une littérature de l’alerte environnementale se développe à partir de 1970. Les quotidiens régionaux font la couverture des événements liés au militantisme écologiste des scientifiques, comme aux mobilisations des sociétés locales contre des projets qui impactent leur territoire (dans l’agglomération lyonnaise: affaires de la « raffinerie baladeuse » et du « marais des Echets »). Cela contraste avec le relatif silence de la presse locale sur les infrastructures nucléaires, critiquées par les médias de la culture alternative comme le célèbre Charlie-Hebdo, ou le nouveau La Gueule ouverte, fondé en 1972 par Pierre Fournier.

Coupure de presse, fonds FRAPNA, Archives départementales du Rhône, 297J329.

Les pollutions accidentelles sont dénoncées, et la naissance d’une politique publique de l’environnement contribue à la sensibilisation à la propreté du cadre de vie. Le pouvoir sait aussi utiliser les médias, d’autant que le gouvernement contrôle toujours la radio et la télévision. Le premier ministre de la protection de la nature et de l’environnement, Robert Poujade, accorde de nombreuses interviews. La télévision publique crée l’émission La France défigurée, qui relaye les mécontentements locaux, sans remettre en cause le système économique et politique.

Références :
– numéro spécial du Temps des Médias, 2015.
– Christian Delporte, « N’abîmons pas la France! L’environnement à la télévision dans les années 1970 », Vingtième siècle, 2012.

50 ans plus tard, malgré la différence évidente dans la liberté de publication de l’information, et dans l’immédiateté et la caisse de résonance que produit l’information numérique,, les phénomènes peuvent présenter une certaine similarité…

Site internet du Progrès, édition du 13 juin 2020